đ Aiden R. Martin
Nos destins sombres
Ăditions du Chat noir, coll. Cheshire, 2022
L’avis sur Instragram
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đ 4e de couverture : Quand on sâappelle OrphĂ©e et quâon se rĂ©veille dans les limbes, il est fort Ă parier quâon nâaura pas envie dây rester. Comme mon illustre prĂ©dĂ©cesseur, je regarde en arriĂšre, non pour mâassurer de la prĂ©sence de mon aimĂ©, mais pour contempler les regrets que je laisse derriĂšre moi.
Mon petit ami, Isidore, est restĂ© Ă la Nouvelle-OrlĂ©ans, dans le monde des vivants, en proie Ă la dĂ©pression et aux tendances suicidaires, chose que je ne peux tolĂ©rer. Alors, mĂȘme si je suis issu dâune famille qui voue un culte Ă Santa Muerte et que je devrais mây connaĂźtre sur le royaume des morts, je refuse de me soumettre Ă ses rĂšgles, au grand dĂ©sarroi dâune banshee excentrique du nom de Cassidy, chargĂ©e de mon passage dans lâau-delĂ .
Au lieu de trouver le repos, je suis obsĂ©dĂ© par lâidĂ©e dâaider mon petit ami, dâautant plus quâun mystĂšre plane sur mon dĂ©cĂšs dont les circonstances Ă©chappent Ă mon souvenir.
Ce que je ne sais pas encore, câest que mon petit caprice va contrarier le dieu de la Mort.
Ou plutĂŽt, les dieux de la MortâŠ
đ Avis : Encore une lecture coup de cĆur, que j’ai dĂ©vorĂ© en deux jours Ă tout casser. Nos destins sombres est une magnifique histoire de deuil, toute en Ă©motions, douleurs et soulagements. J’ai vraiment Ă©tĂ© touchĂ©e par la maniĂšre dont l’auteur traite ces questions. Beaucoup dâamertume douce, teintĂ©e ici et lĂ de violence, de refus, de dĂ©tresse et dâabandon.
Bien Ă©videmment, le premier point qui mâa sĂ©duite est la manipulation du mythe dâOrphĂ©e. Certains lecteurs des Ăditions du Chat Noir savent que j’ai un petit truc avec ce mythe et, malgrĂ© la rĂ©ception plutĂŽt mitigĂ©e de mes quelques lignes dans lâanthologie Montres enchantĂ©es, jây reste attachĂ©e et suis toujours avec curiositĂ© les reprises de ce mythe. J’ai aimĂ© l’Ă©cho constant entre le personnage d’OrphĂ©e Toussaint et le personnage antique, sans pourtant quâil en soit un simple avatar. Je pense que câest une rĂ©Ă©criture rĂ©ussie qui a su capter l’essence du mythogĂšne et la rĂ©-infuser dans quelque chose de plus contemporain, sans pour autant nâen faire quâune rĂ©Ă©criture.
Cela m’amĂšne Ă parler de la manipulation des diffĂ©rentes mythologies, notamment autour de la figure de la mort. C’est tellement bien pensĂ©, c’est juste, c’est fin. Ăa fait plaisir Ă lire. Et merci, merci Aiden R Martin d’avoir fait ressortir les torches inversĂ©es de Thanatos, sujet d’iconographie cher Ă l’un de mes maĂźtres Ă penser et grĂące Ă qui jâai eu de merveilleuses expĂ©riences archĂ©ologiques et probablement grĂące Ă qui jâai aujourdâhui le job de mes rĂȘves. J’ai apprĂ©ciĂ© chacun des avatars de la mort. La douceur de Santa Muerte m’a Ă©mue et le cĂŽtĂ© beau gosse hautain de Thanatos bien fait marrer. Jâai adorĂ© sa version nonchalante et bon vivant du Baron Samedi et c’est un peu dommage que Hela n’ait pas Ă©tĂ© un peu plus dĂ©veloppĂ©e car jâai vraiment aimĂ© son cĂŽtĂ© glaçant et ferme. En revanche, alors que l’Ăgypte est trĂšs prĂ©sente dans tout le texte, les personnages n’interagissent jamais avec Osiris ou Anubis. Un poil dommage. Je trouve aussi que le folklore haĂŻtien est paradoxalement peu prĂ©sent, mais en mĂȘme temps l’auteur ne pouvait pas tout mettre dans ce beau bĂ©bĂ© de dĂ©jĂ 400 pages, Ă©crites en petits caractĂšres qui plus est.
La plume dâAiden R. Martin est trĂšs agrĂ©able, fluide et percutante, mĂȘme si jâavoue ne pas ĂȘtre particuliĂšrement fan des notes de bas de pages dans un roman, mais il y en a peu, et des prises Ă partie directes au lecteur qui sont pourtant souvent assez drĂŽles je dois bien le dire. Petit point qui mâa fait sourire â et surtout prendre une belle petite claque dans la figure : les rĂ©fĂ©rences pop-culture. Pour lâessentiel, il sâagit de rĂ©fĂ©rences que je nâai pas ou que vaguement car, et bien oui, je suis trop vieille dĂ©sormais pour quâelles soient de ma gĂ©nĂ©ration. Au contraire de quelques rĂ©fĂ©rences plus anciennes, et plus explicitĂ©es par lâauteur, mais qui pour moi coulent de source. Bref, bonjour le coup de vieux et la bonne rigolade face Ă cette constatation. Enfin, jâai particuliĂšrement aimĂ© lâalternance des points de vue Ă chaque chapitre entre OrphĂ©e et Isidore qui permet dâavoir une plus grande rĂ©sonance sur lâhistoire. Plusieurs passages â ainsi que les titres des chapitres â dĂ©montrent Ă©galement le talent de lâauteur quant Ă une prose poĂ©tique, notamment celui du cauchemar de la pesĂ©e du cĆur d’OrphĂ©e qui est glaçant de beautĂ© et d’onirisme.
Je suis tombĂ©e dans tous les piĂšges tendus par lâauteur et me suis retrouvĂ©e prise dans lâintrigue comme si je la vivais. Les aventures dâOrphĂ©e dans les limbes ont un cotĂ© fĂ©Ă©rie sombre que jâai vraiment apprĂ©ciĂ©e. Aiden R. Martin tisse cette partie de son univers de maniĂšre trĂšs ouverte avec beaucoup de zones qui nous sont juste esquissĂ©es comme ce raccourci qui passe dans la forĂȘt pas loin dâun lac habitĂ© par un fĂ©e et je trouve que câest un bon moyen pour sâimaginer et sâapproprier ce monde. De mĂȘme, il nous fait vraiment vivre la Nouvelle-OrlĂ©ans et lâambiance particuliĂšre de cette partie de la Louisiane. Mention spĂ©ciale pour le cĂŽtĂ© « nageons avec les alligators ». Certes, certains passages peuvent ĂȘtre difficiles pour un public jeune ou sensible, mais ils sont Ă©galement ceux qui donnent au roman une partie de sa texture et de sa profondeur. Je pense notamment Ă pas mal de pensĂ©es dâIsidore et au passage de la salle de bain. Personnellement en les lisant, jâavais le cĆur qui battait Ă tout rompre. Outre tout ce quâil se passe dans le roman, jâai surtout aimĂ© la fin. Oui câest triste et oui on en voudrait une autre qui ne malmĂšnerait pas nos petits cĆurs – Ă plus forte raison parce que le genre fantastique le permettrait – mais honnĂȘtement, on aime ĂȘtre malmenĂ© et on aime pleurer dans un livre. Autre point, liĂ©, je trouve que cette fin est bonne justement parce que lâauteur ne profite pas du fantastique. Et câest bon. Câest juste et honnĂȘte. AprĂšs tout, il n’est jamais bon de regarder derriĂšre soi… Et OrphĂ©e en sait quelque chose.
Bien Ă©videment la romance au centre de lâhistoire est bouleversante. Jâai particuliĂšrement apprĂ©ciĂ© le fait que ni Isidore, ni OrphĂ©e sont des anges. Ils ont leurs lots dâerreurs et dâactions pas trĂšs belles Ă leurs actifs, ce qui paradoxalement les rends attachants. L’auteur aborde pas mal de thĂšmes relationnels et j’ai aimĂ© cette vĂ©racitĂ©.
Pour conclure, un petit mot sur la couverture de Nicolas Jamonneau que je trouve magnifique.
Au final, Nos sombres destins est une réussite. Un roman des éditions du Chat noir comme je les aime. Je recommande à 100%.
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đ Et vous, lâavez-lu ? Quâen avez-vous pensĂ© ?
A bientĂŽt pour une nouvelle lecture
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Baci, baci
LGM
Un grand merci Ă Lucie pour cette critique qui est, Ă moins que ma mĂ©moire n’ait oubliĂ© certains compliments, la plus appliquĂ©e et la plus belle qui a Ă©tĂ© faite Ă mon premier roman. J’espĂšre ĂȘtre Ă la hauteur pour mes prochains ouvrages et mĂ©riter une telle admiration.
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Merci. Ăa toujours agrĂ©able quand on me dit que les avis sont appliquĂ©s. Encore plus quand ça vient de l’auteur. Rendez-vous donc a ton prochain roman âșïž
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